Page:Stendhal - Chroniques italiennes, Lévy, 1855.djvu/29

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bouche ont été dessinés par le fameux peintre Corrège. Considérée au milieu des portraits qui l’entourent à.la galerie Farnèse, elle a l’air d’une reine. Il est bien rare que l’air gai soit joint à la majesté.

« Après avoir passé huit années entières comme pensionnaire au couvent de la Visitation de la ville de Castro, maintenant détruite, où l’on envoyait, dans ce temps-là, les filles de la plupart des princes romains, Hélène revint dans sa patrie, mais ne quitta point le couvent, sans faire offrande d’un calice magnifique au grand autel de l’église. A peine de retour dans Albano, son père fit venir de Rome, moyennant une pension considérable, le célèbre poète Cechino, alors fort âgé ; il orna la mémoire d’Hélène des plus beaux vers du divin Virgile ; de Pétrarque, de l’Arioste et du Dante, ses fameux élèves. »

Ici le traducteur est obligé de passer une longue dissertation sur les diverses parts de gloire que le XVIe siècle faisait à ces grands poètes. Il paraîtrait qu’Hélène savait le latin. Les vers qu’on lui faisait apprendre parlaient d’amour, et d’un amour qui nous semblerait bien ridicule, si nous le rencontrions en 1838 ; je veux dire l’amour passionné qui se nourrit de grands sacrifices, ne peut subsister qu’environné de mystère, et se trouve toujours voisin des plus affreux malheurs.

Tel était l’amour que sut inspirer à Hélène, à peine âgée de dix sept ans, Jules Branciforte. C’était un de ses voisins fort pauvre ; il habitait une chétive maison bâtie dans la montagne, à un quart de lieue de la ville, au milieu des ruines d’Albe et sur les bords du précipice de cent