après vingt ans de service, venait d’être élevé au grade de capitaine dans le régiment d’Australie ; je le vois encore, avec son uniforme blanc, à revers et parements noirs. Un jour arrive au régiment M. le comte de Saint-Vincent, son cousin, noble de la cour, qui venait d’être nommé colonel d’Austrasie, à vingt-trois ans. Jamais le capitaine ne songea à être jaloux de son cousin ; celui-ci était de la cour, sa nomination allait sans dire : colonel à vingt-trois ans, et l’autre capitaine à quarante-cinq, après toutes les campagnes de la guerre de sept ans, et la croix de Saint-Louis à cinquante ans, en se retirant. Maintenant nous voyons le moindre lieutenant pâlir sur l’annuaire militaire ; il étudie d’un œil jaloux la date des brevets de chacun de ses camarades, et ne songe point à organiser une mascarade plaisante pour le prochain carnaval.
Si j’écrivais pour la gloire, je ferais dix pages en style grave, néologique et moral, de la page qui précède, et je serais un homme de lettres distingué ; mais mon amplification lourde ferait un étrange contraste avec la prose vive et légère de M. le président de Brosses.
Il est vrai que le président ne songeait point qu’un jour il serait imprimé ; immense avantage, lequel redouble la platitude d’un sot et les moyens de plaire d’un homme d’esprit.
M. le président de Brosses partit de Dijon pour Avignon, Gênes et l’Italie en 1739, avec MM. de Lacurne, de Sainte-Palaie et Loppin, qui comme lui appartenaient, je crois, à la noblesse de robe de Dijon. (Ville d’esprit et