Page:Stendhal - Chroniques italiennes, Lévy, 1855.djvu/45

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Le capitaine acheta la vigne, et annonça qu’il en achèterait bien d’autres ; puis, rencontrant le mauvais plaisant dans un lieu solitaire, il le tua d’un coup de pistolet.

Après huit années de ce genre de vie, le capitaine mourut ; son aide-de-camp Ranuce adorait Jules ; toutefois, fatigué de l’oisiveté, il reprit du service dans la troupe du prince Colonne. Souvent il venait voir son fils Jules, c’était le nom qu’il lui donnait, et, à la veille d’un assaut périlleux que le prince devait soutenir dans sa forteresse de la Petrella, il avait emmené Jules combattre avec lui. Le voyant fort brave :

— Il faut que tu sois fou, lui dit-il, et de plus bien dupe, pour vivre auprès d’Albano comme le dernier et le plus pauvre de ses habitans, tandis qu’avec ce que je te vois faire et le nom de ton père, tu pourrais être parmi nous un brillant soldat d’aventure, et de plus faire ta fortune. — Jules fut tourmenté par ces paroles ; il savait le latin montré par un prêtre, mais son père s’étant toujours moqué de tout ce que disait le prêtre au-delà du latin, il n’avait absolument aucune instruction. En revanche, méprisé pour sa pauvreté isolé dans sa maison solitaire, il s’était fait un certain bon sens qui, par sa hardiesse, aurait étonné les savans. Par exemple, avant d’aimer Hélène, et sans savoir pourquoi, il adorait la guerre, mais il avait de la répugnance pour le pillage qui, aux yeux de son père le capitaine et de Ranuce, était comme la petite pièce destinée à faire rire, qui suit la noble tragé