Page:Stendhal - Correspondance, I.djvu/354

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aventure de l'abbé de Molière, prenant admirablement vite le ton de l'abbé et du voleur.

L'abbé de Molière était un homme simple et pauvre, étranger à tout, hors à ses travaux sur le système de Descartes ; il n'avait point de valet et travaillait dans son lit, faute de bois, sa culotte sur sa tête, par dessus son bonnet, les deux côtés pendant à droite et à gauche. Un matin, il entend frapper à sa porte. « Qui va là ? — Ouvrez. » Il tire un cordon et la porte s'ouvre. L'abbé de Molière ne re­gardant point : « Qui êtes-vous ? — Donnez-moi de l'argent. — De l'argent ? —■ Oui, de l'argent. — Ah ! j'entends, vous êtes un voleur ? — Voleur ou non, il me faut de l'argent. — Vraiment, oui, il vous en faut ? Eh bien, cherchez là-dedans. » Il tend le cou et présente un des côtés de sa culotte. Le voleur fouille. « Eh bien, il n'y a point d'argent. — Vraiment non, mais il y a une clef. — Eh bien cette clef ? — Cette clef, prenez-la. — Je la tiens. — Allez-vous-en à ce secrétaire ; ouvrez. » Le voleur met la clef à un autre tiroir. « Laissez donc ; ne dérangez pas ; ce sont mes papiers 1 Vendrebleu ! fînirez-vous ? ce sont mes papiers. A l'autre tiroir, vous trouverez de l'argent. — Le voici. — Eh bien, prenez. Fermez donc le tiroir. » Le