Page:Stendhal - Correspondance, I.djvu/86

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

hommes à produire le beau. Comme je ne fais pas de brouillon, il est possible que malgré toute mon attention à être clair, tu ne me comprennes pas à la première lecture ; je t'invite donc à conserver mes lettres ; mais prends bien garde de les laisser voir à quelqu'un. Tu pourras les lire à Caroline.

Hors la géométrie, il n'y a qu'une seule manière de raisonner, celle des faits. En parcourant la liste des grands hommes en tout genre, on s'aperçoit que les nations pauvres ont toujours été et plus avides de gloire et plus fécondes en grands hommes que les nations opulentes. Les peuples les plus heureux sont les peuples pauvres ; car ils sont les plus ver­tueux, et il n'y a qu'un chemin au bonheur sur la terre, c'est la vertu. Les scélérats paraissent quelquefois heureux de loin ; mais, quand on les approche, on s'aper­çoit qu'ils sont rongés de remords et de craintes. Là-dessus, rappelle-toi Pygma-lion, ce cruel roi de Tyr, peint dans Télè-maque. Plus un homme a de besoins, plus il donne de prise à la tyrannie ; plus une femme a de besoins, plus elle donne de prise au vice.

En Angleterre, il y a un parti de l'oppo­sition souvent formé par les gens vertueux ; demande des détails là-dessus au grand-