Page:Stendhal - Journal, t3, 1932, éd. Debraye et Royer.djvu/43

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
1809 — 5 mai.
25
allemagne

de la viande et du vin au couvent. Je fus sur le point d’y recevoir un coup de sabre dans le ventre, d’un officier qui rossait un soldat avec la poignée.

En allant et venant, j’admirais toujours plus la situation de Lambach. Je me disais : « Voilà le spectacle le plus intéressant que j’aie vu de ma vie. » En voyant quelques pièces de canon braquées à côté de la porte du couvent, je dis à Lacombe :

« Il ne manque ici que l’ennemi et un incendie. »

Nous rentrons, nous dormons sur des chaises chez le commandant de la place, nous soupons et nous redormons. À deux heures, on parle de départ. Je descends sur la place. En m’y promenant, je remarque beaucoup de clarté derrière une maison ; je me dis : « voilà un bivouac bien brillant ! » La clarté et la fumée augmentent, un incendie se déclare. Le trouble du moment de l’incendie a été observé par moi dans toutes ses gradations, depuis la tranquillité du sommeil jusqu’aux chevaux du fourgon accourant de toutes parts au galop.

On ne voyait pas la flamme ; à cela près, l’incendie était superbe : une colonne de fumée pleine de lumière traversait la ville transversalement, elle nous éclairait sur le chemin jusqu’à deux lieues.

Le coteau qui est au nord de la ville en était éclairé au point que, d’en bas, où j’attendais avec ma voiture l’arrivée de Cuny, je pouvais compter les troncs des pins situés sur le sommet. Le kiosque