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Page:Stendhal - Journal, t3, 1932, éd. Debraye et Royer.djvu/97

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1810 — 22 avril.
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paris

que jamais je ne le serai autant. Ce n’est pas dans ma nature d’être aimable pour les femmes. À une heure, au bois de Boulogne avec Louis, nous revenons à cinq ; à sept, la Vedova capricciosa*. Mme Correa bonne chanteuse, mais manque d’expression, ne remplace point pour moi la Strinasacchi. Un monde d’enfer, je suis mal placé, n’y vois goutte et, étant très fatigué, je tombe dans un demi-sommeil agréable.



22 avril.


Je rencontre l’aimable Ceranuto qui arrive de Naples, il fait la cour à une Mme Delaitre. Sa société est arrangée de manière que si elle veut avoir un amant, ça ne peut guère être que lui, d’autant mieux qu’ou il sera le premier, ou du moins personne jusqu’ici, à sa connaissance de lui Ceranuto, n’a dit qu’elle en avait. Le sensible, fin et enfant Ceranuto a en horreur la conduite soutenue qu’il faut tenir pour faire sa cour et obtenir d’être fait écuyer au lieu de chambellan. Cependant son bonheur, d’après son caractère, que les grossièretés rendent malheureux, son bonheur dépend de ce changement. Il dépend aussi beaucoup de cette madame Delaitre. D’ailleurs, elle doit aimer la volupté et, sans être jolie et agréable, Ceranuto croit qu’il y a dans cet amour-là six mois de bonheur ; mais il est timide, et d’ailleurs l’a pris sur un mauvais ton avec elle : il y est timide et respectueux. Tout le monde dit à