Page:Stendhal - La Chartreuse de Parme, I, 1927, éd. Martineau.djvu/267

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À l’époque de la pénitence des treize semaines, le comte Mosca, par pitié et un peu par malice, l’invitait à dîner une et même deux fois par semaine ; le bon archevêque, pour faire sa cour, dînait comme tout le monde. Il eût cru qu’il y avait rébellion et jacobinisme à afficher une pénitence pour une action approuvée du souverain. Mais l’on savait que, pour chaque dîner où son devoir de fidèle sujet l’avait obligé à manger comme tout le monde, il s’imposait une pénitence de deux journées de nourriture au pain et à l’eau.

Monseigneur Landriani, esprit supérieur, savant du premier ordre, n’a qu’un faible, il veut être aimé ; ainsi, attendris-toi en le regardant, et, à la troisième visite, aime-le tout à fait. Cela, joint à ta naissance, te fera adorer tout de suite. Ne marque pas de surprise s’il te reconduit jusque sur l’escalier, aie l’air d’être accoutumé à ces façons ; c’est un homme né à genoux devant la noblesse. Du reste, sois simple, apostolique, pas d’esprit, pas de brillant, pas de repartie prompte ; si tu ne l’effarouches point, il se plaira avec toi ; songe qu’il faut que de son propre mouvement il te fasse son grand vicaire. Le comte et moi nous serons surpris et même fâchés de ce trop rapide avancement, cela est essentiel vis-à-vis du souverain.