Page:Stendhal - La Chartreuse de Parme, I, 1927, éd. Martineau.djvu/290

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Une affaire importante l’appela à Bologne, et deux fois par jour des courriers du cabinet lui apportaient bien moins les papiers officiels de ses bureaux que des nouvelles des amours de la petite Marietta, de la colère du terrible Giletti et des entreprises de Fabrice.

Un des agents du comte demanda plusieurs fois Arlequin squelette et pâté, l’un des triomphes de Giletti (il sort du pâté au moment où son rival Brighella l’entame et le bâtonne) ; ce fut un prétexte pour lui faire passer cent francs. Giletti, criblé de dettes, se garda bien de parler de cette bonne aubaine, mais devint d’une fierté étonnante.

La fantaisie de Fabrice se changea en pique d’amour-propre (à son âge, les soucis l’avaient déjà réduit à avoir des fantaisies) ! La vanité le conduisait au spectacle ; la petite fille jouait fort gaiement et l’amusait ; au sortir du théâtre il était amoureux pour une heure. Le comte revint à Parme sur la nouvelle que Fabrice courait des dangers réels ; le Giletti, qui avait été dragon dans le beau régiment des dragons Napoléon, parlait sérieusement de tuer Fabrice, et prenait des mesures pour s’enfuir ensuite en Romagne. Si le lecteur est très-jeune, il se scandalisera de notre admiration pour ce beau trait de