Page:Stendhal - La Chartreuse de Parme, I, 1927, éd. Martineau.djvu/306

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qui s’y précipita en fondant en larmes. L’abbé Blanès était son véritable père.

— Je t’attendais, dit Blanès, après les premiers mots d’épanchement et de tendresse. L’abbé faisait-il son métier de savant ou bien, comme il pensait souvent à Fabrice, quelque signe astrologique lui avait-il par un pur hasard annoncé son retour ?

— Voici ma mort qui arrive, dit l’abbé Blanès.

— Comment s’écria Fabrice tout ému.

— Oui, reprit l’abbé d’un ton sérieux, mais point triste : cinq mois et demi ou six mois et demi après que je t’aurai revu, ma vie ayant trouvé son complément de bonheur, s’éteindra

Come face al mancar dell alimento

(comme la petite lampe quand l’huile vient à manquer.) Avant le moment suprême, je passerai probablement un ou deux mois sans parler, après quoi je serai reçu dans le sein de notre père ; si toutefois il trouve que j’ai rempli mon devoir dans le poste où il m’avait placé en sentinelle.

Toi tu es excédé de fatigue, ton émotion te dispose au sommeil. Depuis que je t’attends, j’ai caché un pain et une bouteille d’eau-de-vie dans la grande caisse de mes instruments. Donne ces soutiens à ta vie et