Page:Stendhal - La Chartreuse de Parme, II, 1927, éd. Martineau.djvu/186

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

change le numéro ordinaire des lettres, et leur en donne d’arbitraires : A, par exemple, porte le numéro 10 ; le B, le numéro 3 ; c’est-à-dire que trois éclipses successives de la lampe veulent dire B, dix éclipses successives, l’A, etc. ; un moment d’obscurité fait la séparation des mots. On prit rendez-vous pour le lendemain à une heure après minuit, et le lendemain la duchesse vint à cette tour qui était à un quart de lieue de la ville. Ses yeux se remplirent de larmes en voyant les signaux faits par ce Fabrice qu’elle avait cru mort si souvent. Elle lui dit elle-même par des apparitions de lampe : Je t’aime, bon courage, santé, bon espoir ! Exerce tes forces dans ta chambre, tu auras besoin de la force de tes bras. Je ne l’ai pas vu, se disait la duchesse, depuis le concert de la Fausta, lorsqu’il parut à la porte de mon salon habillé en chasseur. Qui m’eût dit alors le sort qui nous attendait !

La duchesse fit faire des signaux qui annonçaient à Fabrice que bientôt il serait délivré, grâces à la bonté du prince (ces signaux pouvaient être compris) ; puis elle revint à lui dire des tendresses ; elle ne pouvait s’arracher d’auprès de lui ! Les seules représentations de Ludovic, qui, parce qu’il avait été utile à Fabrice, était devenu son factotum,