Page:Stendhal - La Chartreuse de Parme, II, 1927, éd. Martineau.djvu/28

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— Un jour peut-être ! mais gardez-vous sur votre tête de rien faire sans mon ordre.

C’était la copie du billet du prince que la duchesse voulait envoyer à Fabrice ; elle ne put résister au plaisir de l’amuser, et ajouta un mot sur la scène qui avait amené le billet ; ce mot devint une lettre de dix pages. Elle fit rappeler le postillon.

— Tu ne peux partir, lui dit-elle, qu’à quatre heures, à porte ouvrante.

— Je comptais passer par le grand égout, j’aurais de l’eau jusqu’au menton, mais je passerais…

— Non, dit la duchesse, je ne veux pas exposer à prendre la fièvre un de mes plus fidèles serviteurs. Connais-tu quelqu’un chez monseigneur l’archevêque ?

— Le second cocher est mon ami.

— Voici une lettre pour ce saint prélat ; introduis-toi sans bruit dans son palais, fais-toi conduire chez le valet de chambre ; je ne voudrais pas qu’on réveillât monseigneur. S’il est déjà renfermé dans sa chambre, passe la nuit dans le palais, et, comme il est dans l’usage de se lever avec le jour, demain matin, à quatre heures, fais-toi annoncer de ma part, demande sa bénédiction au saint archevêque, remets-lui le paquet que voici, et prends les lettres qu’il te donnera peut-être pour Bologne.