Page:Stendhal - La Chartreuse de Parme, II, 1927, éd. Martineau.djvu/310

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« Tu vas revenir sans doute, mon cher ange ! mais je te conseille d’attendre un jour ou deux le courrier que la princesse t’enverra, à ce que j’espère, aujourd’hui ou demain ; il faut que ton retour soit magnifique comme ton départ a été hardi. Quant au grand criminel qui est auprès de toi, je compte bien le faire juger par douze juges appelés de toutes les parties de cet état. Mais, pour faire punir ce monstre-là comme il le mérite, il faut d’abord que je puisse faire des papillotes avec la première sentence, si elle existe. »

Le comte avait rouvert sa lettre :

« Voici bien une autre affaire : je viens de faire distribuer des cartouches aux deux bataillons de la garde ; je vais me battre et mériter de mon mieux ce surnom de Cruel dont les libéraux m’ont gratifié depuis si longtemps. Cette vieille momie de général P… a osé parler dans la caserne d’entrer en pourparlers avec le peuple à demi révolté. Je t’écris du milieu de la rue ; je vais au palais, où l’on ne pénétrera que sur mon cadavre. Adieu ! Si je meurs, ce sera en t’adorant quand même, ainsi que j’ai vécu ! N’oublie pas de faire prendre 300.000 francs déposés en ton nom chez D…, à Lyon.