Page:Stendhal - La Chartreuse de Parme, II, 1927, éd. Martineau.djvu/419

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à faire une absence. On admira sa folie. Quoi ! s’éloigner de la cour au moment où la faveur dont elle était l’objet paraissait sans bornes ! Le comte, parfaitement heureux depuis qu’il voyait qu’il n’y avait point d’amour entre Fabrice et la duchesse, disait à son amie : — Ce nouveau prince est la vertu incarnée, mais je l’ai appelé cet enfant : me pardonnera-t-il jamais ? Je ne vois qu’un moyen de me remettre réellement bien avec lui, c’est l’absence. Je vais me montrer parfait de grâces et de respects, après quoi je suis malade et je demande mon congé. Vous me le permettrez, puisque la fortune de Fabrice est assurée. Mais me ferez-vous le sacrifice immense, ajouta-t-il en riant, de changer le titre sublime de duchesse contre un autre bien inférieur ? Pour m’amuser, je laisse toutes les affaires ici dans un désordre inextricable ; j’avais quatre ou cinq travailleurs dans mes divers ministères, je les ai fait mettre à la pension depuis deux mois, parce qu’ils lisent les journaux français ; et je les ai remplacés par des nigauds incroyables.

Après notre départ, le prince se trouvera dans un tel embarras, que, malgré l’horreur qu’il a pour le caractère de Rassi, je ne doute pas qu’il ne soit obligé de le rappeler, et moi je n’attends qu’un ordre