Page:Stendhal - La chartreuse de Parme (Tome 2), 1883.djvu/129

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parut plus : apparemment qu’il passait pour libéral dans la prison ; on eut soin d’en envoyer un autre à mine rébarbative, lequel ne répondit jamais que par un grognement de mauvais augure à toutes les choses agréables que l’esprit de Fabrice cherchait à lui adresser. Quelques-unes des nombreuses tentatives de la duchesse pour lier une correspondance avec Fabrice avaient été dépistées par les nombreux agents de la marquise Raversi, et, par elle, le général Fabio Conti était journellement averti, effrayé, piqué d’amour-propre. Toutes les huit heures, six soldats de garde se relevaient dans la grande salle aux cent colonnes du rez-de-chaussée ; de plus, le gouverneur établit un geôlier de garde à chacune des trois portes de fer successives du corridor, et le pauvre Grillo, le seul qui vît le prisonnier, fut condamné à ne sortir de la tour Farnèse que tous les huit jours, ce dont il se montra fort contrarié. Il fit sentir son humeur à Fabrice, qui eut le bon esprit de ne répondre que par ces mots : Force nébieu d’Asti, mon ami, et il lui donna de l’argent.

— Eh bien ! même cela, qui nous console de tous les maux, s’écria Grillo indigné, d’une voix à peine assez élevée pour être entendue du prisonnier, on nous défend de le recevoir et je devrais le refuser, mais je le prends ; du reste, argent perdu ; je ne puis rien vous dire sur rien. Allez, il faut que vous soyez joliment coupable, toute la