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l’empêche d’être vue d’en bas ; ce sera quelque signal pour un point éloigné. Tout à coup il remarqua que cette lueur paraissait et disparaissait à des intervalles fort rapprochés. C’est quelque jeune fille qui parle à son amant du village voisin. Il compta neuf apparitions successives : Ceci est un I, dit-il ; en effet, l’I est la neuvième lettre de l’alphabet. Il y eut ensuite, après un repos, quatorze apparitions : Ceci est un N ; puis, encore après un repos, une seule apparition : C’est un A ; le mot est Ina.

Quelle ne fut pas sa joie et son étonnement, quand les apparitions successives, toujours séparées par de petits repos, vinrent compléter les mots suivants :


Ina pense a te.

Évidemment : Gina pense à toi !

Il répondit à l’instant par des apparitions successives de sa lampe au vasistas par lui pratiqué :


Fabrice t’aime !

La correspondance continua jusqu’au jour. Cette nuit était la cent soixante-treizième de sa captivité, et on lui apprit que depuis quatre mois on faisait ces signaux toutes les nuits. Mais tout le monde pouvait les voir et les comprendre ; on commença dès cette première nuit à établir des abréviations : trois apparitions se suivant très rapidement indiquaient