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Ranuce-Ernest V était avare au fond ; mais il était éperdument amoureux, et il espérait fixer la duchesse à sa cour : il pria sa mère d’accepter une somme fort considérable, et de donner des fêtes. La grande-maîtresse sut tirer un admirable parti de cette augmentation de richesses ; les fêtes de Parme, cet hiver-là, rappelèrent les beaux jours de la cour de Milan et de cet aimable prince Eugène, vice-roi d’Italie, dont la bonté laisse un si long souvenir.

Les devoirs du coadjuteur l’avaient rappelé à Parme ; mais il déclara que, par des motifs de piété, il continuerait sa retraite dans le petit appartement que son protecteur, monsignor Landriani, l’avait forcé de prendre à l’archevêché ; et il alla s’y enfermer, suivi d’un seul domestique. Ainsi il n’assista à aucune des fêtes si brillantes de la cour, ce qui lui valut à Parme et dans son futur diocèse une immense réputation de sainteté. Par un effet inattendu de cette retraite qu’inspirait seule à Fabrice sa tristesse profonde et sans espoir, le bon archevêque Landriani, qui l’avait toujours aimé, et qui, dans le fait, avait eu l’idée de le faire coadjuteur, conçut contre lui un peu de jalousie. L’archevêque croyait avec raison devoir aller à toutes les fêtes de la cour, comme il est d’usage en Italie. Dans ces occasions, il portait son costume de grande cérémonie, qui, à peu de chose près, est le même que celui qu’on lui voyait dans