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fauteuil ; elle essaya de faire tête à l’orage, mais bientôt fut obligée de déserter le salon.

— Il faut convenir, mon pauvre Gonzo, que vous êtes d’une maladresse rare, s’écria avec hauteur l’un des officiers qui finissait sa quatrième glace. Comment ne savez-vous pas que le coadjuteur, qui a été l’un des plus braves colonels de l’armée de Napoléon, a joué jadis un tour pendable au père de la marquise, en sortant de la citadelle où le général Conti commandait, comme il fût sorti de la Steccata (la principale église de Parme).

— J’ignore en effet bien des choses, mon cher capitaine, et je suis un pauvre imbécile qui fait des bévues toute la journée.

Cette réplique, tout à fait dans le goût italien, fit rire aux dépens du brillant officier. La marquise rentra bientôt ; elle s’était armée de courage, et n’était pas sans quelque vague espérance de pouvoir elle-même admirer ce portrait de Fabrice, que l’on disait excellent. Elle parla avec éloges du talent de Hayez, qui l’avait fait. Sans le savoir elle adressait des sourires charmants au Gonzo, qui regardait l’officier d’un air malin. Comme tous les autres courtisans de la maison se livraient au même plaisir, l’officier prit la fuite, non sans vouer une haine mortelle au Gonzo ; celui-ci triomphait, et, le soir, en prenant congé, fut engagé à dîner pour le lendemain.

— En voici bien d’une autre ! s’écria Gonzo, le