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chez elle, elle se mit au lit pour pouvoir penser à Fabrice en toute liberté ; et le lendemain, d’assez bonne heure, Fabrice reçut un billet ainsi conçu :

« On compte sur votre honneur ; cherchez quatre braves de la discrétion desquels vous soyez sûr, et demain, au moment où minuit sonnera à la Steccata, trouvez-vous près d’une petite porte qui porte le numéro 19, dans la rue Saint-Paul. Songez que vous pouvez être attaqué, ne venez pas seul. »

En reconnaissant ces caractères divins, Fabrice tomba à genoux et fondit en larmes : Enfin, s’écria-t-il, après quatorze mois et huit jours ! Adieu les prédications.

Il serait bien long de décrire tous les genres de folie auxquels furent en proie, ce jour-là, les cœurs de Fabrice et de Clélia. La petite porte indiquée dans le billet n’était autre que celle de l’orangerie du palais Crescenzi, et, dix fois dans la journée, Fabrice trouva le moyen de la voir. Il prit des armes, et seul, un peu avant minuit, d’un pas rapide, il passait près de cette porte, lorsqu’à son inexprimable joie, il entendit une voix bien connue dire d’un ton très-bas :

— Entre ici, ami de mon cœur.

Fabrice entra avec précaution et se trouva à la vérité dans l’orangerie, mais vis-à-vis une fenêtre fortement grillée et élevée, au-dessus du sol, de trois ou quatre pieds. L’obscurité était profonde,