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était frappée par une juste punition, pour avoir été infidèle à son vœu à la Madone : elle avait vu si souvent Fabrice aux lumières, et même deux fois en plein jour et avec des transports si tendres, durant la maladie de Sandrino ! Elle ne survécut que de quelques mois à ce fils si chéri, mais elle eut la douceur de mourir dans les bras de son ami. Fabrice était trop amoureux et trop croyant pour avoir recours au suicide ; il espérait retrouver Clélia dans un meilleur monde, mais il avait trop d’esprit pour ne pas sentir qu’il avait beaucoup à réparer.

Peu de jours après la mort de Clélia, il signa plusieurs actes par lesquels il assurait une pension de mille francs à chacun de ses domestiques, et se réservait pour lui-même une pension égale ; il donnait des terres valant 100,000 livres de rente à peu près à la comtesse Mosca ; pareille somme à la marquise del Dongo, sa mère, et ce qui pouvait rester de la fortune paternelle, à l’une de ses sœurs mal mariée. Le lendemain, après avoir adressé à qui de droit la démission de son archevêché et de toutes les places dont l’avaient successivement comblé la faveur d’Ernest V et l’amitié du premier ministre, il se retira à la Chartreuse de Parme, située dans les bois voisins du Pô, à deux lieues de Sacca.

La comtesse Mosca avait fort approuvé, dans le temps, que son mari reprît le ministère, mais jamais elle n’avait voulu consentir à rentrer dans