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qui, tout vieux ministre qu’il était, fut attendri de cette histoire d’amour qu’il ignorait en grande partie.

— Je vous procurerai l’absence du marquis pendant cinq ou six jours au moins : quand la voulez-vous ?

À quelque temps de là, Fabrice vint dire au comte que tout était préparé pour que l’on pût profiter de l’absence.

Deux jours après, comme le marquis revenait à cheval d’une de ses terres aux environs de Mantoue, des brigands, soldés apparemment par une vengeance particulière, l’enlevèrent, sans le maltraiter en aucune façon, et le placèrent dans une barque, qui employa trois jours à descendre le Pô et à faire le même voyage que Fabrice avait exécuté autrefois après la fameuse affaire Giletti. Le quatrième jour, les brigands déposèrent le marquis dans une île déserte du Pô, après avoir eu le soin de le voler complètement, et de ne lui laisser ni argent ni aucun effet ayant la moindre valeur. Le marquis fut deux jours entiers avant de pouvoir regagner son palais à Parme ; il le trouva tendu de noir et tout son monde dans la désolation.

Cet enlèvement, fort adroitement exécuté, eut un résultat bien funeste : Sandrino, établi en secret dans une grande et belle maison où la marquise venait le voir presque tous les jours, mourut au bout de quelques mois. Clélia se figura qu’elle