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novo et de Bologne, et les chargea de lettres. Mais ce n’est pas tout, se dit le malheureux comte, le prince peut avoir la fantaisie de faire exécuter ce malheureux enfant, et cela pour se venger du ton que la duchesse prit avec lui le jour de ce fatal billet. Je sentais que la duchesse passait une limite que l’on ne doit jamais franchir, et c’est pour raccommoder les choses que j’ai eu la sottise incroyable de supprimer le mot procédure injuste, le seul qui liât le souverain… Mais bah ! ces gens-là sont-ils liés par quelque chose ? C’est là sans doute la plus grande faute de ma vie, j’ai mis au hasard tout ce qui peut en faire le prix pour moi : il s’agit de réparer cette étourderie à force d’activité et d’adresse ; mais enfin si je ne puis rien obtenir, même en sacrifiant un peu de ma dignité, je plante là cet homme ; avec ses rêves de haute politique, avec ses idées de se faire roi constitutionnel de la Lombardie, nous verrons comment il nous remplacera… Fabio Conti n’est qu’un sot, le talent de Rassi se réduit à faire pendre légalement un homme qui déplaît au pouvoir.

Une fois cette résolution bien arrêtée de renoncer au ministère si les rigueurs à l’égard de Fabrice dépassaient celles d’une simple détention, le comte se dit : Si un caprice de la vanité de cet homme imprudemment bravée me coûte le bonheur, du moins l’honneur me restera… À