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Page:Stendhal - Lamiel, éd. Stryienski, 1889.djvu/119

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pour la désennuyer. Elle laissait aller sa vie comme du temps où sa beauté et des mots charmants peuplaient son salon.

Le docteur augmenta à plaisir l’indisposition de la grande dame, il la rendit folle de douleur ; il est vrai que tous les jours, pendant une heure, il la soumettait à l’horrible magnétisme de son éloquence infernale. La duchesse fut si indisposée qu’elle n’eut plus la force de venir voir deux fois par jour Lamiel chez ses parents. Alors, par les soins du docteur qui voulait la guérir de sa langueur, elle en vint à un tel point de folie qu’elle quitta le château pour venir passer publiquement plusieurs jours dans la chaumière voisine de celle des Hautemare, que le docteur fit évacuer et meubler en quelques heures. Ce qui augmentait le zèle de Sansfin, c’est que le Du Saillard était furieux et employait tout son génie à chercher un moyen quelconque d’éloigner le médecin bossu. Le moyen de défense de celui-ci fut bien simple. Tout le monde à Carville avait peur du curé. Le docteur, après l’avoir répété sur tous les tons deux ou trois cents fois, fit comprendre à la duchesse et au village que le curé était jaloux de lui parce qu’il sauvait la vie à la petite Lamiel, pour laquelle