Page:Stendhal - Lamiel, éd. Stryienski, 1889.djvu/230

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l’abbé Clément ! Comme celui-ci eût été gentil en me rapportant mon étui !

Au bout d’un quart d’heure qui parut bien long à la jeune fille, le duc trouva un compliment bien tourné et naturel. Lamiel sourit, et aussitôt Fédor devint charmant ; le temps cessa de lui paraître horriblement long, ainsi qu’à Lamiel. Encouragé par ce petit succès qu’il sentit avec délices, le duc devint charmant, car il avait infiniment d’esprit ; la nature avait seulement oublié de lui donner la force de vouloir. On avait tant et si souvent accablé de conseils ce pauvre jeune homme sur les mille gaucheries que l’on commet à seize ans quand on est obligé à parler dans un salon comme un homme du monde, que, au moindre mouvement à faire, au moindre mot à dire, il était stupéfié par le souvenir de trois ou quatre règles contradictoires et auxquelles il ne fallait pas manquer. C’est le même embarras qui rend nos artistes si plats. Le mot agréable qu’il trouva en voulant séduire Lamiel lui donna de l’audace ; il oublia les règles et il fut gentil. Il était difficile d’être plus joli[1].

  1. Beyle indique dans une note qu’il doit placer ici le portrait de Fédor. Voir, à l’Appendice IV, p. 322,