Page:Stendhal - Lamiel, éd. Stryienski, 1889.djvu/255

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mourait de rire toutes les fois qu’elle lui adressait la parole.

Au milieu du diner, le duc arriva, et sa mine fut charmante lorsqu’il reconnut Lamiel. Le pauvre jeune homme ne put manger tant il était consterné de la dartre apparente qui avait donné une couleur abominable à une des joues de son amie.

Lamiel mourait d’envie de lui parler.

— Est-ce que je l’aimerais, par hasard ? Est-ce ça, la partie morale de l’amour ?

Elle n’avait pas l’habitude de résister à ses fantaisies ; elle se leva de table avant le dessert, et, peu après, le duc se leva aussi. Mais comment trouver la chambre de son amie, comment la demander ? Il tutoya un garçon, qui lui dit hardiment :

— Où est-ce que j’ai gardé les cochons avec vous, pour me tutoyer ?

Le duc n’avait jamais voyagé sans Duval. Il donna vingt sous à un autre garçon, qui le conduisit à la porte de Lamiel, qui, pour la première fois de sa vie, l’attendait avec impatience.

— Eh ! venez donc, mon bel ami, m’aimez-vous malgré ce malheur ? lui dit-elle en lui présentant sa joue malade à baiser.