Page:Stendhal - Lamiel, éd. Stryienski, 1889.djvu/80

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secret de ne point s’ennuyer de toute cette journée-là. De son côté, Mme  Hautemare eut un long récit à faire à son mari le bedeau, et à toutes ses amies de Carville. Le moins diverti fut le docteur, qui, au lieu de rentrer chez lui après avoir couvert de boue les laveuses, descendit au galop vers le pont du Houblon, sans songer que son fusil en bandoulière bondissait sur son dos de la façon la plus ridicule.

— Grand Dieu ! se disait-il, il faut que je sois un grand sot d’aller me prendre de bec avec ces coquines-là ! Il y a des jours où je devrais me faire attacher au pied de mon lit par mon domestique.

Pour faire diversion à son humeur, le docteur chercha dans sa mémoire si, sur la grande route qu’il suivait toujours ventre à terre, il ne se trouverait pas quelque malade assez bon pour croire que le docteur lui faisait une visite du soir.

Tout à coup, il trouva bien mieux qu’un malade. M. Du Saillard, le curé de Carville, était allé dîner, ce jour-là, au château de Saint-Prix, à trois lieues de son village. Ce curé était terrible dans ses haines et l’un des gros bonnets de la congrégation ; mais par compensation, — et c’est là ce qui sauve