Page:Stendhal - Lamiel, éd. Stryienski, 1889.djvu/81

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la civilisation en France, il y a compensation dans tout, — par compensation donc, le terrible Du Saillard n’aimait pas à se trouver seul sur la grande route, dans son petit cabriolet.

Ce fut donc avec un vif plaisir qu’il vit arriver Sansfin chez les Saint-Prix. Ces deux hommes auraient pu se faire beaucoup de mal, et vivaient politiquement ensemble. C’était surtout auprès de la duchesse de Miossens que Du Saillard redoutait les anecdotes malignes que le docteur savait si bien dire.

Le docteur, à cheval, escorta le curé ; mais quand il se retrouva seul chez lui, il retrouva son noir chagrin et les souvenirs du lavoir. Un instant après, il lui arriva une consolation. On vint le chercher pour un beau jeune homme de cinq pieds six pouces qui venait, à peine âgé de vingt-cinq ans, d’avoir une belle et bonne attaque d’apoplexie. Le docteur passa la nuit auprès de lui, et, tout en lui appliquant le traitement convenable, il eut le plaisir de voir cet être si beau mourir vers la pointe du jour.

— Voilà un beau corps vacant, se disait-il ; pourquoi mon âme ne peut-elle pas y entrer ?

Le docteur, fils unique d’un fermier enrichi par