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Page:Stendhal - Lamiel, 1928, éd. Martineau.djvu/103

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bonne compagnie qui doit avoir l’air d’un dernier effort d’une nature qui ne demanderait qu’à ne point agir. Dès qu’elle n’était pas immédiatement surveillée par les regards sévères de quelques-unes des anciennes femmes de chambre, elle parcourait en sautant la suite des pièces qu’il fallait traverser pour arriver à celle où se trouvait la duchesse. Avertie par les dénonciations de ses femmes, la grande dame fit placer une glace dans son salon pour apercevoir cette gaieté de son fauteuil. Quoique Lamiel fût la légèreté même, tout était si tranquille dans ce vaste château, que l’ébranlement causé par ses sauts s’entendait de partout ; tout le monde en était scandalisé, et c’est ce qui acheva de décider la fortune de la jeune paysanne. Quand la duchesse fut bien sûre de n’avoir pas fait acquisition d’une petite fille se donnant les airs de demoiselle, elle se livra avec folie au vif penchant qu’elle sentait pour Lamiel. Celle-ci ne comprenait pas la moitié des mots qu’elle lisait dans la Quotidienne. La duchesse prétendit que pour bien lire il faut comprendre, elle partit de là pour se donner le plaisir d’expliquer à Lamiel toutes les choses dont parle la Quotidienne. Ce ne fut pas une petite affaire, et, par ce moyen et sans que la duchesse l’eût prévu, ce soin d’instruire