Page:Stendhal - Lamiel, 1928, éd. Martineau.djvu/123

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jeune : la tromper était fort difficile. Bientôt Lamiel fut convaincue que ce pauvre médecin d’une figure aussi burlesque était le seul ami qu’elle eût au monde. En peu de temps, par des plaisanteries bien calculées, Sansfin réussit à détruire toute l’affection que le bon cœur de Lamiel avait pour sa tante et son oncle Hautemare.

— Tout ce que vous croyez, tout ce qu’ils vous disent aujourd’hui et qui vous rend si charmante, est gâté par un reflet de toutes les pauvretés que le bon Hautemare et sa femme vous ont données pour des vérités respectables. Ce que la nature vous a donné, c’est une grâce charmante et une sorte de gaieté qui se communique, à votre insu, aux personnes qui ont le bonheur de vous entendre. Voyez la duchesse, elle n’a pas le sens commun, et pourtant, si elle était encore jolie, elle passerait pour une femme fort aimable ; eh bien ! vous avez fait sa conquête au point qu’il n’est aucun sacrifice qu’elle n’acceptât avec joie pour se conserver le bonheur de passer ses soirées avec vous. Mais votre position est dangereuse, vous devez vous attendre au complot le plus noir de la part des femmes de chambre ; Madame Anselme, surtout, change de physionomie seulement à entendre un seul petit mot de louange