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Page:Stendhal - Lamiel, 1928, éd. Martineau.djvu/204

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jeune fille d’une politesse tellement mielleuse que le cœur de celle-ci en fut révolté. Lamiel lui dit brusquement :

— Madame m’a ordonné de continuer mon éducation de lectrice, et je viens prendre des livres.

— Prenez tout ce que vous voudrez, mademoiselle ; ne sait-on pas que tout ce qui est au château vous appartient ?

Lamiel profita de la permission et emporta plus de vingt volumes, elle sortit de la bibliothèque, puis y rentra avec vivacité.

— J’oubliais…, dit-elle à Mme Anselme qui suivait ses mouvements d’un œil jaloux.

Lamiel avait d’abord pris les romans de Mme de Genlis, la Bible, Éraste ou l’Ami de la jeunesse, Sethos, les histoires d’Anquetil, et autres livres permis par la duchesse. « Je suis une sotte, se dit-elle. Je m’occupe du profond dégoût que me donnent les compliments mielleux de cette fille qui m’exècre ; je néglige le précepte du docteur, juger toujours la situation et s’élever au-dessus de la sensation du moment. Je puis m’emparer de tous les livres dont madame me défendait la lecture avec tant de rigueur. » Elle prit les romans de Voltaire, la correspondance de Grimm, Gil Blas, etc., etc.

Mme Anselme avait dit qu’elle prendrait