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le rouge et le noir

La Mole ; elle était suivant lui l’une des plus belles personnes de Paris.

— Comme elle serait belle sur un trône ! dit-il à M. de Croisenois ; et il se laissa amener sans difficulté.

Il ne manque pas de gens dans le monde qui veulent établir que rien n’est de mauvais ton comme une conspiration ; cela sent le jacobin. Et quoi de plus laid que le jacobin sans succès ?

Le regard de Mathilde se moquait du libéralisme d’Altamira avec M. de Croisenois, mais elle l’écoutait avec plaisir.

Un conspirateur au bal, c’est un joli contraste, pensait-elle. Elle trouvait à celui-ci, avec ses moustaches noires, la figure du lion quand il se repose ; mais elle s’aperçut bientôt que son esprit n’avait qu’une attitude : l’utilité, l’admiration pour l’utililé.

Excepté ce qui pouvait donner à son pays le gouvernement des deux Chambres, le jeune comte trouvait que rien n’était digne de son attention. Il quitta avec plaisir Mathilde, la plus séduisante personne du bal, parce qu’il vit entrer un général péruvien.

Désespérant de l’Europe, le pauvre Altamira en était réduit à penser que, quand les États de l’Amérique méridionale seront forts et puissants, ils pourront