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l’admiration ébahie

Troublé lui-même au delà de toute expression par cette découverte, il fut assez heureux pour ne paraître que fatigué.

M. de La Mole fit son éloge. La marquise lui adressa la parole un instant après, et lui fit compliment sur son air de fatigue. Julien se disait à chaque instant : Je ne dois pas trop regarder mademoiselle de La Mole, mais mes regards non plus ne doivent point la fuir. Il faut paraître ce que j’étais réellement huit jours avant mon malheur… Il eut lieu d’être satisfait du succès, et resta au salon. Attentif pour la première fois envers la maîtresse de la maison, il fit tous ses efforts pour faire parler les hommes de sa société et maintenir la conversation vivante.

Sa politesse fut récompensée : sur les huit heures, on annonça madame la maréchale de Fervaques. Julien s’échappa et reparut bientôt, vêtu avec le plus grand soin. Madame de La Mole lui sut un gré infini de cette marque de respect, et voulut lui témoigner sa satisfaction, en parlant de son voyage à madame de Fervaques. Julien s’établit auprès de la maréchale, de façon à ce que ses yeux ne fussent pas aperçus de Mathilde. Placé ainsi, suivant toutes les règles de l’art, madame de Fervaques fut pour lui l’objet de l’admiration la plus ébahie.