Page:Stendhal - Lucien Leuwen, I, 1929, éd. Martineau.djvu/277

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de me dire les noms de ces beaux messieurs qui, si je ne me trompe, cherchent à vous plaire. Ainsi c’est peut-être à vos beaux yeux que je dois les marques d’éloignement dont ils m’honorent en ce moment.

— Ce jeune homme qui parle à ma mère est M. de Lanfort.

— Il est fort bien, et celui-là a l’air civilisé ; mais ce monsieur qui s’appuie à la cheminée avec un air si terrible ?

— C’est M. Ludwig Roller, ancien officier de cavalerie. Les deux voisins sont ses frères, également officiers démissionnaires après la Révolution de 1830. Ces messieurs n’ont pas de fortune ; leurs appointements leur étaient nécessaires. Maintenant ils ont un cheval entre eux trois ; et, d’ailleurs, leur conversation est singulièrement appauvrie. Ils ne peuvent plus parler de ce que vous appelez, vous autres messieurs les militaires, le harnachement, la masse de linge et chaussure, et autres choses amusantes. Ils n’ont plus l’espoir de devenir maréchal de France, comme le maréchal de Larnac, qui fut le trisaïeul d’une de leurs grand-mères.

— Votre description les rend aimables à mes yeux ; et ce gros garçon, court et épais, qui me regarde de temps à autre