Page:Stendhal - Lucien Leuwen, II, 1929, éd. Martineau.djvu/240

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— Parce que 65 n’est pas égal à 24.

— Mais cette différence…

La voix de Lucien se voilait.

— Pas de phrases, monsieur ! Je vous rappelle à l’ordre. La politique et le sentiment nous écartent également de l’objet à l’ordre du jour :

Sera-t-il dieu, table ou cuvette ?

C’est de vous qu’il s’agit, et c’est à quoi nous cherchons une réponse. Le comptoir vous ennuie et vous aimez mieux le bureau particulier du comte de Vaize ?

— Oui, mon père.

— Maintenant paraît une grande difficulté : serez-vous assez coquin pour cet emploi ?

Lucien tressaillit ; son père le regarda avec le même air gai et sérieux tout à la fois. Après un silence, M. Leuwen père reprit :

— Oui, monsieur le sous-lieutenant, serez-vous assez coquin ? Vous serez à même de voir une foule de petites manœuvres ; voulez-vous, vous subalterne, aider le ministre dans ces choses, ou le contrecarrer ? Voudrez-vous faire aigre, comme un jeune républicain qui prétend repétrir les Français pour en faire des anges ? That is the question, et c’est là-dessus que vous me répondrez ce soir, après l’Opéra,