Page:Stendhal - Lucien Leuwen, III, 1929, éd. Martineau.djvu/229

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Après ce succès, M. Leuwen passa huit jours au lit. Un jour de repos aurait suffi, mais il connaissait son pays, où le charlatanisme à côté du mérite est comme le zéro à la droite d’un chiffre et décuple sa valeur. Ce fut au lit que M. Leuwen reçut les félicitations de plus de cent membres de la Chambre. Il refusa huit ou dix membres non dépourvus de talent qui voulaient s’enrôler dans la Légion du Midi.

— Nous sommes plutôt une réunion d’amis qu’une société de politique… Votez avec nous, secondez-nous pendant la session, et si cette fantaisie, qui nous honore, vous dure encore l’année prochaine, ces messieurs, accoutumés à vous voir partager nos manières de voir, toutes de conscience, iront eux-mêmes vous engager à venir à nos dîners de bons garçons.

« Il faut déjà le comble de l’abnégation et de l’adresse pour mener vingt-huit de ces oisons-là, pensait M. Leuwen, que serait-ce s’ils étaient quarante ou cinquante, et encore des gens d’esprit, dont chacun voudrait être mon lieutenant, et bientôt évincer son capitaine ? »

[Les justes milieux un peu fins même accouraient. Ils ne pouvaient se figurer qu’un banquier riche fît sérieusement de l’opposition.

M. de Vaize était allé voir M. de Beau-