Page:Stendhal - Lucien Leuwen, III, 1929, éd. Martineau.djvu/288

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Dans cette crise ministérielle vint se joindre à ce sujet de tristesse le remords cuisant de ne pas avoir d’amitié ou de tendresse pour son père. Le chasme[1] entre ces deux êtres était trop profond. Tout ce qui, à tort ou à raison, paraissait sublime, généreux, tendre à Lucien, toutes les choses desquelles il pensait qu’il était noble de mourir pour elles, ou beau de vivre avec elles, étaient des sujets de bonne plaisanterie pour son père et une duperie à ses yeux. Ils n’étaient peut-être d’accord que sur un seul sentiment : l’amitié intime consolidée par trente ans d’épreuves. À la vérité, M. Leuwen était d’une politesse exquise et qui allait presque jusqu’au sublime et à la reproduction de la réalité pour les faiblesses de son fils ; mais, ce fils avait assez de tact pour le deviner, c’était le sublime de l’esprit, de la finesse, de l’art d’être poli, délicat, parfait.

  1. Séparation.