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CHAPITRE LXIII


[Madame Grandet n’avait rien de romanesque dans le caractère ni dans les habitudes, ce qui formait, pour qui avait des yeux et n’était pas ébloui par un port de reine et une fraîcheur digne d’une jeune fille anglaise, un étrange contraste avec sa façon de parler toute sentimentale et toute d’émotion, comme une nouvelle de M. Nodier. Elle ne disait pas : Paris, mais : cette ville immense. Madame Grandet, avec cet esprit si romanesque en apparence, portait dans toutes ses affaires une raison parfaite, l’ordre et l’attention d’un petit marchand de fil et de mercerie en détail.[1]]

Quand elle se fut accoutumée au bonheur d’être la femme d’un ministre, elle songea que M. Leuwen pouvait être égaré par la douleur de voir son fils devenir la victime d’un amour sans espoir, ou du moins

  1. En note Stendhal indique que ce portrait devra être reporté dans la première partie : Nancy, à la scène du bal où le lecteur doit voir Mme Grandet pour la première fois. On sait que cette présentation n’a pas eu lieu. N. D. L. E.