Page:Stendhal - Lucien Leuwen, III, 1929, éd. Martineau.djvu/350

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à propos des vingt-cinq millions du président Jackson, du droit sur les sucres ou de quelque autre question du moment, agitaient lourdement quelque point d’économie politique sans pouvoir s’élever à comprendre même les bases de la question.

« Voilà sans doute la lie de la France, pensait Lucien ; cela est bête et vendu. Mais du moins cela n’a pas peur et ne regrette pas le passé, et ils n’hébètent pas leurs enfants en les réduisant pour toute lecture à la Journée du Chrétien.

« Dans ce siècle où tout est argent, où tout se vend, quoi de comparable à une immense fortune dépensée d’une main adroite et cauteleuse ? Ce Grandet ne dépense pas dix louis sans songer à la position qu’il occupe dans le monde. Ni lui ni sa femme ne se permettent les caprices que je me passe, moi, fils de famille. »

Il les voyait lésiner souvent pour la location d’une loge ou demander une loge au Château ou au ministère de l’Intérieur.

Lucien voyait madame Grandet entourée des hommages universels. Au milieu de toute cette philosophie, un certain instinct monarchique existant encore chez les Français à carrosse lui disait bien qu’il serait plus flatteur d’être préféré par une femme