Page:Stendhal - Mémoires d’un touriste, I, 1929, éd. Martineau.djvu/212

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celle de Vienne, en Autriche, qui deux fois, en 1797 et en 1809, a fourni des corps de volontaires que les armées françaises ont été obligées de tuer en entier, six semaines après qu’ils avaient été formés. Dans la campagne de 1809, sur les bords de la Traun, les volontaires de Vienne, en mourant sous la mitraille du maréchal Masséna, étaient tombés les uns en avant, les autres en arrière ; mais la ligne ondoyante formée par leurs chaussures d’uniforme et fort remarquable n’avait pas plus de huit pieds de largeur. Un homme qui avait un crachat y était caporal, et, qui plus est, s’était fait tuer.

Mes affaires m’ont souvent appelé à Lyon ; dès que je suis en cette ville, j’ai envie de bâiller, et les plus belles choses ne font plus d’effet sur moi. Il est vrai que j’ai toujours logé chez le fatal cousin, dans la rue Bât-d’Argent. C’est pour la première fois que j’ose m’établir à l’auberge.

Mais j’en demande pardon aux gens de mérite de ce pays, l’habitude de m’ennuyer est la plus forte. Je fermerais les yeux volontiers. Tout ce que je vois augmente mon dégoût, qui va jusqu’au dépit ; il n’y a pas jusqu’à la forme des balcons de fer qui ne me déplaise, ce sont des lignes tourmentées et lourdes. J’ai