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L’ART GOTHIQUE

carrée à Nîmes, ou de Saint-Pierre de Rome. Mais le vulgaire des églises gothiques, par exemple les cathédrales de Lyon, de Nevers ou de Vienne, sont pour moi comme des tableaux médiocres ; et quand je vois un savant se passionner pour elles, il me fait l’effet d’un homme qui veut arriver vite à l’Académie. Sentez-vous ainsi ?

Je ne sens bien l’effet d’une église gothique médiocre que lorsqu’il s’agit d’une pauvre chapelle située au milieu des bois. Il pleut à verse ; quelques pauvres paysans réunis par la petite cloche viennent prier Dieu en silence ; on n’entend d’autre bruit pendant la prière que celui de la pluie qui tombe : mais ceci est un effet de musique, et non d’architecture.

Au milieu de tant de tombeaux, la plupart ridicules et chargés d’inscriptions plus vulgaires qu’eux encore, s’il est possible, on rencontre tout à coup dans les hauts du Père-Lachaise un tombeau gothique. L’effet de tristesse et de sérieux est sur-le-champ produit ; c’est comme une mesure de la musique de Mozart. L’effet est centuplé si les moulures gothiques sont chargées de neige.

Ce soir, à la table d’hôte de l’auberge de Valence, située dans le faubourg sur la