Page:Stendhal - Pages d’Italie.djvu/340

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ambassadeur, ou comme homme du monde. Il ne prétend à aucun talent politique et il a du moins le mérite d’être au-dessus de ses prétentions. Son nom est surchargé de tous les souvenirs que la chevalerie et la noblesse peuvent évoquer ; mais le fils des premiers barons chrétiens n’a point besoin de ces attributs de circonstance pour rehausser son mérite réel. Il est franc, généreux, courtois ; c’est un compromis entre le passé et le présent de la nation française, un chaînon qui lie les jours d’autrefois avec ceux d’aujourd’hui. Aussi peu entiché que possible des préjugés de sa caste, il n’a rien non plus de la rudesse soldatesque de la révolution. Il a servi l’empire sous Napoléon, et a été de tout temps fidèle à la France. Les manières de cour de l’empire étaient mâles, souvent âpres ; elles changeaient ou dégoûtaient les membres de la vieille aristocratie qui étaient invités ou admis au partage des honneurs. Le duc de Laval a fort peu de ces nuances : son esprit, en passant à travers tant d’atmosphères variées, a laissé derrière lui toutes les haines et les fausses notions qui ternissent les meilleures qualités de ses confrères. Personne n’est plus accessible au malheur et au mérite. Et c’est une singulière gloire pour un ambassadeur que la réputation d’avoir agrandi