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Page:Stendhal - Pensées, II, 1931, éd. Martineau.djvu/189

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pensées

fait ce caractère la tête la plus pleine des plus grandes vérités, excepté celles qui détromperaient l’âme du bonheur qu’elle cherche[1].

Voici en quoi les habitudes sont essentielles pour le poète comique. Ce n’est que par les habitudes qu’il prouve aux spectateurs le long règne d’une passion et il le prouve de la meilleure manière possible : par des faits.

Ces faits sont les actions du protagoniste. Quand le poète ne prouve pas la passion de son protagoniste par des habitudes, il n’a peint que l’homme passionné momentanément.

Or le spectateur sait bien qu’on n’est point maître, du moins communément, de se donner des passions, il se dit donc intérieurement : « Cet homme aimable ou haïssable sera peut-être tout autre demain que sa passion aura passé. »

Il en est bien différemment quand il voit des habitudes. Elles lui répondent que la passion a déjà duré longtemps et elles lui annoncent qu’elle durera encore longtemps, il sait bien qu’il est très diffi-

  1. Il est très comique (on ne trouve cela que dans le haut comique) de montrer le protagoniste tordant (pliant, viciant) les sensations qui lui annoncent les vérités qui le détromperaient du bonheur après lequel il court. Est-ce toujours par une erreur que nous sommes malheureux ?