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ailleurs et la crainte des serpents, nous avons erré toute la journée à deux lieues environ de la Riccia. Nous avons commencé nos courses par revoir pour la cinquième fois les fresques du Dominiquin au couvent de Saint-Basile, à Grotta-Ferrata. Saint Nil, moine grec, [représenté dans ces fresques,] fut en son temps un homme du plus grand courage et tout à fait supérieur. Il a trouvé un peintre digne de lui. Ce que j’ai raconté de son histoire à nos compagnes de voyage a doublé l’effet de la fresque du Dominiquin. Je m’en suis profondément affligé avec ces dames. Elles sont loin encore d’aimer et de comprendre la peinture. Le sujet ne fait rien au mérite du peintre ; c’est un peu comme les paroles d’un libretto pour la musique. – Tout le monde s’est moqué de cette idée, même le sage Frédéric.

29 août. On a beaucoup parlé peinture hier soir chez madame la duchesse de D***. Il y avait sur le piano un magnifique portrait de César Borgia, par Giorgion[1], qu’elle voulait acheter. Un

  1. M. le comte Borgia, de Milan, après avoir fait la guerre du temps de Napoléon avec une bravoure digne de ses aïeux, protège les arts pendant la paix ; il vient de faire exécuter par Palaggi une fort bonne copie de ce portrait. L’original appartient au célèbre graveur Longhi, le maître des Anderloni et des Garavaglia, dont je vous conseille d’acheter les gravures.