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RACINE ET SHAKSPEARE

la dernière scène du cinquième acte à l’arrivée sur le roc de Sainte-Hélène avec la vision prophétique des six années de tourments, de vexations basses et d’assassinats à coups d’épingles, exécutés par sir Hudson Lowe. Il y a un beau contraste entre le jeune Dumoulin, qui, à Grenoble, au premier acte, se dévoue à Napoléon, et le général impassible qui, à Sainte-Hélène, dans l’espoir d’un cordon de seconde classe, entreprend de le faire mourir à petit feu, et sans qu’on puisse accuser son maître d’empoisonnement.

Autre contraste entre des personnages du second ordre : M. Benjamin Constant plaidant la cause d’une constitution raisonnable aux Tuileries avec Napoléon, qui se montre franchement despote, traite la France comme son domaine, ne parle que de son intérêt propre à lui, Bonaparte, et trois mois après M. le comte de Las-Cases déplorant, dans l’amertume et la sincérité de son cœur de chambellan, que l’Empereur ait été sur le point de se trouver dans le cas d’ouvrir une porte lui-même.

Voilà évidemment une belle tragédie ; il ne manque plus que cinquante ans d’intervalle et du génie pour la faire. Elle est belle, parce que c’est un seul événement. Qui pourrait le nier ?

Une nation, sans résolution pour entre-