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FÉDER

— Tu m’aimes donc ? s’écriait Féder d’une voix entrecoupée.

— Si je t’aime ! répondait Valentine. Cet étrange dialogue durait déjà depuis plusieurs minutes lorsque tout à coup Valentine eut la conscience de ce qui lui arrivait. Elle fit quelques pas en arrière avec une promptitude étonnante, et un sentiment de surprise, mêlé d’horreur, se peignit dans ses traits.

— Oh ! monsieur Féder, il faut oublier à jamais ce qui vient de se passer.

— Jamais, je vous le jure, jamais aucune parole sortie de ma bouche ne vous rappellera cet instant de bonheur sublime. Puisque je ne puis me soumettre à un effort aussi pénible, ai-je besoin de vous dire que, dans l’avenir comme par le passé, jamais votre nom ne sera prononcé par moi ?

— Je meurs de honte en vous regardant ; soyez assez bon pour me laisser un instant de solitude.

Féder s’éloignait avec toutes les apparences du respect le plus profond.

— Mais vous devez me croire folle ! s’écria Valentine en se rapprochant de la fenêtre.

Féder, de son côté, fit aussi quelques pas et se trouva fort près de Valentine.

— On venait de m’apprendre votre