Page:Stendhal - Romans et Nouvelles, II, 1928, éd. Martineau.djvu/43

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
31
LE COFFRE ET LE REVENANT


répétait-elle d’une voix convulsive ; sortez !

Tout l’éclat de la plus pure vertu brillait dans ses yeux.

— Non, je ne sortirai pas avant que tu m’aies entendu. Depuis deux ans, je n’ai pu t’oublier ; nuit et jour, j’ai ton image devant les yeux. Ne m’as-tu pas juré devant cette croix qu’à jamais tu serais à moi ?

— Sortez ! lui répéta-t-elle avec fureur, ou je vais appeler, et vous et moi allons être égorgés.

Elle courut à une sonnette, mais don Fernando y fut avant elle et la serra dans ses bras. Don Fernando était tremblant ; Inès s’en aperçut fort bien, et perdit toute la force qu’elle prenait dans sa colère.

Don Fernando ne se laissa plus dominer par les pensées d’amour et de volupté, et fut tout à son devoir.

Il était plus tremblant qu’Inès car il sentait qu’il venait d’agir envers elle comme un ennemi ; mais il ne trouva ni colère ni emportement.

— Tu veux donc la mort de mon âme immortelle ? lui dit Inès. Mais, au moins, crois une chose, c’est que je t’adore et que je n’ai jamais aimé que toi. Il ne s’est pas écoulé une minute de l’abominable vie que je mène depuis mon mariage, pendant