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Page:Stendhal - Romans et Nouvelles, II, 1928, éd. Martineau.djvu/44

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ROMANS ET NOUVELLES

laquelle je n’aie songé à toi. C’était un péché exécrable : j’ai tout fait pour t’oublier, mais en vain. N’aie pas horreur de mon impiété, mon Fernando : le croiras-tu ? ce saint crucifix que tu vois là, à côté de mon lit, bien souvent ne me présente plus l’image de ce Sauveur qui doit nous juger ; il ne me rappelle que les serments que je t’ai faits en étendant la main vers lui dans ma petite chambre d’Alcolote. Ah ! nous sommes damnés, irrémissiblement damnés, Fernando ! s’écria-t-elle avec transport ; soyons du moins bien heureux pendant le peu de jours qui nous reste à vivre.

Ce langage ôta toute crainte à don Fernando ; le bonheur commença pour lui.

— Quoi ! tu me pardonnes ? tu m’aimes encore ?…

Les heures fuyaient rapidement, le jour baissait déjà ; Fernando lui raconta l’inspiration soudaine qui lui était venue le matin à la vue du coffre. Ils furent tirés de leur ravissement par un grand bruit qui se fit vers la porte de la chambre. C’était don Blas qui venait chercher sa femme pour la promenade du soir.

— Dis que tu t’es trouvée mal à cause de l’excessive chaleur, dit don Fernando à Inès. Je vais me renfermer dans le coffre. Voici la clef de ta porte ; fais semblant