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Page:Stendhal - Romans et Nouvelles, II, 1928, éd. Martineau.djvu/68

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ROMANS ET NOUVELLES

Quand Liéven frappa à sa porte, le lendemain, il était amoureux fou. Pour ne pas réveiller trop tôt l’inconnue, il avait eu la patience d’attendre son sergent sur la porte, et d’aller dans un café signer ses papiers.

Il avait loué une chambre dans le voisinage ; il apportait à l’inconnue des vêtements et même un masque.

— Ainsi, madame, je ne vous verrai pas si vous l’exigez, lui dit-il à travers la porte.

L’idée du masque plut à la jeune Espagnole, en la distrayant de son profond chagrin.

— Vous êtes si généreux, lui dit-elle sans ouvrir, que je prends la hardiesse de vous prier de laisser contre la porte le paquet de hardes que vous avez acheté pour moi. Quand je vous aurai entendu descendre, je le prendrai.

— Adieu, madame, dit Liéven en s’en allant.

Léonor fut si charmée de la promptitude de l’obéissance, qu’elle lui dit presque du ton de l’amitié la plus tendre :

— Si vous pouvez, monsieur, revenez dans une demi-heure.

Lorsqu’il revint, Liéven la trouva masquée ; mais il vit les plus beaux bras, le plus beau cou, les plus belles mains. Il était ravi.