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Page:Stendhal - Romans et Nouvelles, II, 1928, éd. Martineau.djvu/88

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ROMANS ET NOUVELLES

» — Comme j’hésitais à venir ici vous garder, Mayral m’a dit que vous étiez bien belle femme. « Rien de plus aisé, » a-t-il ajouté, « que de prendre ma place auprès d’elle ; ce sera drôle. Elle a voulu, dans les temps, se moquer de moi : je me moquerai d’elle. » À cette condition, j’ai consenti ; mais, comme je n’osais pas, il a fait venir la chaise de poste jusque devant la porte, et est monté pour vous embrasser devant moi, qu’il a fait cacher à côté du lit.

Ici encore, les sanglots étouffèrent la voix de Léonor.

— Le jeune sauteur qui était avec moi, reprit-elle, était intimidé et me donnait les détails les plus vrais et les plus désolants sur Mayral. J’étais au désespoir.

» — Peut-être m’a-t-il fait prendre un philtre, me disais-je, car je ne puis le haïr.

» En présence de telles infamies, je ne puis le haïr, monsieur, je sens que je l’adore. »

Doña Léonor s’interrompit et resta pensive.

— Étrange aveuglement ! pensa Liéven. Une femme de tant d’esprit et si jeune, croire au sortilège !

— Enfin, reprit doña Léonor, ce jeune homme, me voyant pensive, commença à avoir moins de peur. Il m’a quittée brus-