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Page:Stendhal - Romans et Nouvelles, II, 1928, éd. Martineau.djvu/96

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ROMANS ET NOUVELLES

la terrible lettre qu’il recevait, le chevalier, après l’avoir embrassé tendrement, s’approcha du fleuve dans l’espoir de trouver quelque petit bateau ; il eut le bonheur de voir près du bord un pêcheur qui, monté dans la plus exiguë des nacelles, retirait son filet. Il appela cet homme :

« Je suis poursuivi par mes créanciers ; il y aura un demi-louis pour toi, si tu rames toute la nuit. Il faudra me déposer près de ma maison à une demi-lieue avant Blois. » Saint-Ismier suivit la Loire jusqu’à ***, faisant le tour des villes à pied pendant la nuit, et le jour se faisant conduire par quelque petit bateau de pêcheur. Il ne fut rejoint par son domestique et ses chevaux qu’à ***, petit village voisin de ***. De là, suivant la mer à cheval, et à une lieue de distance, et laissant entendre, lorsqu’on le pressait de questions, qu’il était un gentilhomme protestant, parent des d’Aubigné et comme tel un peu persécuté, il eut le bonheur de gagner sans encombre les rives de la Dordogne. Des intérêts assez puissants l’appelaient à Bordeaux, mais comme nous l’avons dit, il craignait fort que le capitaine Rochegude n’eut déjà reçu l’ordre de l’arrêter.

« Le cardinal tire beaucoup d’argent de la province de Normandie, l’une de celles qui ont été le moins épuisées par nos